Il est assis en face à moi, à une petite table d’un bar lounge. Il me dit que ses enfants sont presque adultes à présent, alors que je bloque sur ses cheveux grisonnants en repensant à tout ce que l’on s’était dit, à tout ce que l’on voulait se faire de bestial sans jamais être passés à l’action. Ce n’était pas l’envie qui manquait à l’époque, mais nous étions tous les deux déjà pris. Ses yeux bleu-foncés, en amandes, me déshabillent à nouveau et provoquent la même sensation au fond de mon jean qu’une décennie plus tôt.
— Tant de choses… Je suis mariée maintenant, tu sais ? — Oui, on m’a dit… Quand je lui demande comment va sa femme, il utilise un joker. Ça m’arrange un peu qu’il ne réponde pas à ma courtoisie. — Il m’arrive de penser à toi de temps en temps, répond-il. Une fois, il m’avait avoué s’être masturbé aussitôt en rentrant du boulot, après une de nos conversations. Elle l’avait tellement tendu qu’il avait dû faire sa petite affaire dans sa voiture, au fond de son garage. Un peu transpirant, la tête remplie de vices, haletant, avide de délivrance alors que sa main va et vient à toute vitesse sur sa queue... Si penser à tout ça quand je me touche veut dire que je pense à lui, alors je pense à lui de temps en temps moi aussi. — Tu te souviens, dit-il, quand je t’ai ramenée chez toi après le pot de départ de Paul ? — Oui, pourquoi ? — Sur la route, tu m’avais dit que ton mec était en déplacement ce jour-là. Je me suis toujours demandé si c’était une invitation dont je n’ai pas profité. La chaleur me monte aux joues. — Je ne sais pas quoi te dire, dis-je, je ne me souviens pas. Un regard malicieux illumine son visage. Il attrape ma main sous la table. Il ne m’avait jamais pris la main. On ne s’est jamais touchés, ni même effleurés lui et moi, alors sentir sa main sur la mienne, la chaleur de sa peau, me trouble. — Je déteste ce sentiment d’inachevé… — Peut-être que je suis meilleure dans tes fantasmes, tu sais ! — Je ne saurais jamais. Il plante ses yeux dans les miens et recommence : — Pas vrai ? Je ne saurais jamais ? Il tire alors un peu sur mon bras et place ma main sur son entrejambe. Mes doigts sentent une massive érection sous le tissu de son pantalon. Putain. Ce sexe sous mes doigts veut rentrer chez moi. Mon ventre se tord de désir. Et merde. J’hausse les épaules, je lui fais la moue de « Prends la décision pour nous deux, moi je peux pas » Il me regarde maintenant sérieusement, genre l’heure est grave. Il se lève en cachant sa bosse sous son manteau et me tend la main pour m’aider à me lever. Main qu’il ne lâche pas et qu’il tire derrière lui alors qu’il nous emmène comme si de rien en direction des toilettes pour hommes. Il passe la tête pour voir si quelqu’un est là, un mec sort, nous regarde en passant. Ce mec sait ce qui se trame, il peut voir la culpabilité sur mon visage, nul doute. Nous rentrons dans l’une des cabines et nous nous retrouvons face à face. La respiration rapide, nous nous observons une seconde, comme pour nous laisser le temps de renoncer mais nous cédons en mêlant nos langues affamées. Alors c’est ça que ça fait de l’embrasser ! Ce n’est pas ce que j’avais imaginé, c’est plus obscène encore. Je veux qu’il me prenne. Sa main déboutonne mon jean et le descend juste assez pour s’introduire dans mes dessous. Bordel ! Ses doigts sont déjà là. Je suis tellement excitée qu’il m’en faudra peu pour en finir. J’ouvre sa braguette et vais chercher sa queue dans son boxer. Sa respiration impatiente m’excite. J’aimerais prendre le temps de faire les choses bien et de le mettre dans ma bouche mais là, tout de suite, je n’ai qu’une envie c’est de sentir sa chair taper au fond de moi. Je descends mon jean un peu plus pour pouvoir écarter les jambes, le ramène à moi et le supplie de me baiser. Son gland pointe à l’entrée de mon sexe. J’aurais pu tout arrêter, lui dire qu’on en reste là, qu’on est en train de faire une grosse connerie et que l’on va regretter, mais j’ai pris son érection dans ma main, j’ai relevé une jambe et je me suis empalée sur lui. Il a geint son plaisir. Il a replanté sa langue dans ma bouche et a commencé à remuer au fond de moi. Ses va-et-vients font frotter sa braguette sur mon clitoris. Je ne sais pas si c’est voulu mais il va me faire jouir en moins de deux. Il se vantait d’être bon, je le croyais à moitié, j’aime les preuves. Les preuves sont là : dans ce mouvement appuyé, presque lent, qu’il fait avec ses hanches. L’exquise sensation se fait sentir au creux de mon ventre, elle arrive, elle vient, mes jambes me tiennent à peine. Je ne me retiens même pas de jouir, j’ai envie qu’il sache qu’il me rend dingue. Il me regarde fiévreux alors que mon sexe se referme sur lui en spasmes incontrôlables. Il continue ses mouvements jusqu’à ce que mon orgasme s’épuise. Quand j’ouvre les yeux à nouveau, il semble décidé à en finir lui aussi. Le rythme s’accélère, son regard devient noir. « Viens dans ma bouche. » ai-je juste le temps de murmurer avant qu’il ne perde la raison et décharge en saccades dans mon corps. Voilà ce à quoi j’ai pensé ce matin, alors que j’avais juste fait un rêve bateau à son propos. Mon subconscient voulait que je pense à T. cette nuit. Des années que nous n’avons pas parlé. Il ne sait même pas qu’il a inspiré un personnage de livre érotique. Un jour, je lui dirai peut-être… © Tous droits réservés - Charlie M.P. |