Je venais de finir mes études des Beaux Arts. Je n’avais pas vraiment envie de travailler tout de suite, je voulais m’éclater un peu pour quelques mois, peindre, sculpter, créer, sortir... Mon père en avait décidé autrement. Vivre chez lui m’obligeait à me plier à ses règles.
Il avait donc parlé à un de ses amis qui tenait une galerie en ville et ce dernier avait accepté de me prendre à l’essai pendant deux mois. Quand j’arrive à la Galerie, il n’y a personne. Les portes en verre sont fermées. J’attends quelques minutes et fais le tour pour voir s’il y a une porte à l’arrière. Je note une berline bleu foncé dans le parking. Il y a effectivement une porte, je frappe. Au bout d’un petit moment la porte s’ouvre en grand et l’ami de mon père apparait. — Marion, excuse-moi, dit-il. Je n’ai pas vu l’heure. Entre donc. Je ne retiens pas les prénoms mais je reconnais son visage. Il est déjà venu à la maison. Il a l’air un peu en dehors de ses pompes, à me faire rentrer vite, à me montrer où le suivre de façon précipitée. Il travaille d'ordinaire seul et fait clairement une faveur à mon père en m’embauchant. Nous passons dans un corridor plein de toiles sous bulles, de sculptures dans des caisses remplies de chips de polystyrène. — Tu veux un café ? dit-il. — Oui, volontiers. Il m’invite à m’assoir une fois dans la cuisine. Il n’y a là qu’une toute petite table, deux chaises, un comptoir avec un évier, un micro-onde et une machine à café. Il attrape une tasse renversée sur le séchoir à côté de l’évier et m’en sert un. — Sucre ? Lait ? — Les deux, oui, merci. Il a l’air un peu nerveux dans sa façon de faire tout ça très vite et quelque part, cela aide mon appréhension pour ce nouveau travail. Il me tend le café et s’assoie en face de moi. Il me fait penser à mon prof d’Art contemporain. Jeune dans sa façon de s’habiller, des touches de couleurs que certains n’oseraient pas porter à son âge. Mon père m’a eue jeune, alors il ne doit pas être si vieux que ça, mais la quarantaine tout de même. — Je me souviens que vous êtes venu deux ou trois fois à la maison, dis-je. Je devais être encore au lycée. — Oui, je passais plus de temps avec ton père il y a quelques années. Il me regarde comme s’il découvrait mon visage, qu’il essayait de se souvenir de la jeune fille que j’étais. — Alors ? dis-je. Qu’est-ce qu’on fait aujourd’hui ? — J’ai reçu une collection d’un jeune artiste bulgare, Dragomir Stoyanov. Des peintures magnifiques, pleines de petits détails, une palette sombre de très bon goût. — Comment s’appelle sa série ? — Les « 8 péchés capitaux » — Huit ? Quel est le 8e ? — Eh bien, ce sera intéressant que tu me dises ce que tu en penses. On va les accrocher aujourd’hui et on verra si tu devines. Quelques minutes plus tard, nous sommes sur le sol, à déballer les peintures. — Ah, mais ce ne sont pas les sept péchés originaux ! dis-je. — Non, ce sont des péchés modernes. Je déballe « la haine », « l’opulence », « l’injustice », « la jalousie », et lui « la frénésie », « l’impatience », « l’hypocrisie » et un miroir. — Je sais ! dis-je. — Quoi donc ? — Le 8e, c’est tellement évident ! Le miroir ! C’est le narcissisme. Il me regarde malicieusement. — Oui, voilà, c’est ça. À sa tête, j’ai l’impression que ce n’est pas ça. Trop simple ? Erreur de débutante ? La galerie est un espace carré avec un demi-mur qui sépare la pièce en deux. Il me demande d’en accrocher 3. Il met le 8e péché – le miroir – d’un côté du mur séparateur De temps à autre, je jette un œil dans sa direction du haut de mon escabeau. Il met son index sur ses lèvres en reculant pour vérifier que le tableau n’est pas de travers. Le bruit de ses chaussures qui vont et qui viennent sur le sol est tout le son qui nous entoure. — Vous ne mettez jamais de musique quand vous travaillez ? dis-je. — Ça m’arrive… Il lève la tête vers moi, du bout de la salle. — Une main sur l’escabeau s’il te plait, dit-il. Il a l'air d'avoir peur que je tombe. Je m’agrippe. — Vas mettre de la musique si tu veux, j’ai une petite enceinte que tu peux brancher à ton téléphone. Je descends de l’escabeau et il me suit des yeux jusqu’à ce que je disparaisse dans la cuisine où j’ai laissé mon sac. Me regardait-il d'une certaine façon ? Bien qu’il ait presque le double de mon âge, il reste un homme, avec des désirs, des fantasmes. Mais je me fais peut-être des films. Je trouve l’enceinte, la branche à mon téléphone. Ne connaissant pas ses goûts et vu l’ambiance studieuse, je décide de mettre une playlist de LoFi. Je reviens dans la salle et il approche alors que je pose mon téléphone sur un socle. — C’est pas mal ça, dit-il en appréciant la musique. C’est doux. Je lève les yeux vers lui. — Oui, c’est ce que je mettais pour réviser. Ça aide à se concentrer. Il me regarde de façon bienveillante mais je sens bien que je l’intéresse un peu, comme s’il se retenait de me toucher. Alors, comme pour lui donner l’autorisation de se décontracter en ma présence, je mets ma main sur son bras. — Allez, dis-je, elles ne vont pas s’accrocher toutes seules, ces toiles ! Il faut y aller avec tellement de délicatesse et nous changeons tellement d’avis sur leur placement que nous y passons toute la journée. Après deux carafes de café et un sandwich, la nuit est tombée. Je l’aide à imprimer les cartels à rajouter à côté de chaque œuvre. Je découpe le dernier papier, assise à côté de lui. — Tu fais du travail admirable, dit-il. Je suis très content. Je fais passer minutieusement le texte entre les plaques de plexiglass. — J’apprécie particulièrement le soin avec lequel tu fais les choses. J'ai toujours aimé faire plaisir à mes profs. Aucune idée de la raison. Mais du coup, son petit commentaire, pour l’éternelle bonne élève que je suis, me ferait presque rougir. — Viens, dit-il en passant son bras dans mon dos, mettons-nous à la place des visiteurs, faisons un tour. Nous partons de la porte et restons devant la première œuvre un instant, vérifiant la lumière, le placement du cartel, l'orthographe... et admirant l’œuvre réellement pour la première fois. — Tu vois la rapidité avec laquelle il a peint cette ligne ? dit-il. Tellement intelligent ! Même dans le coup de pinceau on ressent la frénésie. Je dis oui, je le regarde du coin de l’œil. Je ne sais pas si c’est parce qu’il fait sombre, si je commence juste à m’habituer à sa présence, ou sa façon d’être subjugué par la toile, mais mon cœur se met à accélérer. Il me rappelle de plus en plus ce prof avec qui il y avait un petit jeu de séduction, du flirt innocent. Il m’invite à passer à la seconde œuvre, passant une fois encore sa main dans mon dos. Il fait cela pour chaque toile, et à chaque fois, cette légère pression contre ma colonne vertébrale me donne de plus en plus le frisson. J’ai, depuis toujours, des plaques rouges dans le cou et sur les joues lorsque je suis nerveuse, et je sens cette chaleur en ce moment-même sur ma peau. Je cache mon cou comme je peux et évite de me tourner vers lui le plus possible. Même avec cette pénombre, il pourrait le remarquer. Nous arrivons face au miroir, à côté duquel il n’y a pas de cartel. — Alors ? dit-il. Tu penses toujours que c’est le narcissisme ? Je regarde son reflet me dire ça, puis je me regarde, moi. Il ne peut clairement pas louper mon état à présent, et ça me fait rougir encore plus. Il passe derrière moi et nous regarde dans le miroir. Le sentir si près dans mon dos, à m’observer, est aussi intimidant qu’excitant. Il se penche à mon oreille. — Alors ? — Hum… Si ce n’est pas le narcissisme… Je n’arrive pas à réfléchir. Son souffle dans mon cou me perturbe trop. Je sens à présent dans ses infimes rapprochement, dans sa respiration, qu’il est excité, et le voir comme ça dans le reflet agit sur moi aussi. Je n’ai jamais rien fait avec mon prof, mais il a été à l’origine de nombreux fantasmes. J’ai toujours été attirée par les hommes plus âgés qui m’apprennent des choses, qui savent ce qu’ils veulent. Il faut croire qu'il ne sera pas une exception. Et le voir dans cet état, dans ce reflet, à me déshabiller des yeux fait naitre un désir si fort entre mes cuisses que je lui attrape la main et la place devant mon cou, à quelques centimètres, comme pour lui cacher mes rougeurs. Il reste silencieux, à regarder notre image. Il n’ose pas me toucher. Il descend la main, planant au-dessus de mon sein. Je lis l’envie dans ses yeux, dans les miens aussi. Le fait qu’il ne me touche pas met encore plus mon corps en éveil. Je me vois déboutonner mon chemisier, un bouton, un à un, jusqu’à l’enlever complètement. Il reste muet mais sa respiration parle pour lui. En soutien-gorge devant lui, il voit maintenant à quelle vitesse mon cœur bat. Il se penche dans mon cou et s’enivre du parfum de ma peau. Son regard revient vers le miroir et je descends mes bretelles, une à une, et tire mon soutien-gorge vers le bas pour dévoiler mes seins. Il passe ses deux mains devant moi, en effleure à peine les bouts pointés. Je le regarde dans le reflet et ramène ses mains contre moi. Il prend une grande inspiration. Je suis comme en transe. Sentir sa peau contre la mienne, à un endroit si intime… Il les retire rapidement. — Je suis désolé, dit-il. Je ne sais pas ce qui m’a pris. Je ne bouge pas. Lui, dans mon dos, non plus. Il regarde mes seins dans le miroir. Je défais la fermeture de mon pantalon, et je le laisse glisser le long de mes jambes. Il ferme la bouche qui s’est entre-ouverte sous la surprise. Je passe une main lente sous ma dentelle rose, le regardant droit dans les yeux. Cette image me plait. Elle est innocente et vicieuse. Je me vois faire tout ça et mon plaisir monte. J’allume cet homme, qui cherche à se retenir, qui cherche à faire les choses bien. J'ai envie de lui faire perdre la raison. Je passe un doigt dans ma fente, imaginant sa main à la place de la mienne, le voyant plonger dans un état second. Il expire dans mon dos, si près de faire sauter ses beaux principes… Ma main s’active sous la dentelle et m’extirpe un gémissement. — Monsieur Edevane… dis-je dans un souffle. — Délicieuse petite créature... Que veux-tu de moi ? Je lui prends la main et vient la plonger sous la mienne. Il soupire dans mon dos. Sentir ses doigts d’homme respectable entre mes cuisses, ses doigts curieux qui se font vite un chemin me rend folle. Il perd son visage dans le creux de mon épaule. Je passe la main dans mon dos et trouve une verge tendue dans son pantalon. Je la caresse par dessus le tissu, alors qu’il s’aventure à me pénétrer d’un doigt. — Hm… Monsieur Edevane… J'en veux plus... — Tout ce que tu voudras. Tout. Dis-moi. Je descends sa fermeture éclair. — Tu es sûre ? Je réponds d’un hochement de tête. Il sort alors sa queue de son pantalon et plaque son érection contre mes fesses. Je passe ma main dessus, le branle timidement. — Mon dieu, dit-il. Qu’est-ce que nous sommes en train de faire ? Son reflet m’électrise. Le voir complètement perdu m’excite tellement. Je baisse ma culotte, me mets sur la pointe des pieds et pointe sa queue contre mon vagin. — Tu me rends complètement dingue... Il pousse en moi et rentre d’une traite. Nous regardons dans le miroir ce que ce simple mouvement a provoqué sur nos visages. Et il commence à me rentrer dedans comme un fou, en ne lâchant pas mes yeux une seule seconde, s’agrippant à mes seins. Il souffle son plaisir à mon oreille. Il remet sa main dans ma culotte et vient me chercher de l’autre côté, frottant ses doigts rapidement contre mon clitoris. — Oh Marion, Marion, Marion…, répète-t-il. Viens pour moi. Il n'a même pas besoin de me le demander. Je sens mes muscles se contracter autour de lui et sur sa main. Un râle sort de ma bouche. Il continue de remuer en moi, alors que j’épuise mon plaisir sur sa queue dans de longs gémissements. Il ne loupe rien du spectacle. Il voit tout. — Put... T'es belle quand tu jouies... Et soudain, alors que mes spasmes commencent à ralentir et qu’un sentiment de plénitude m’envahit, sa bouche s’ouvre en grand. Il ponctue chacune de ses décharges par un « merde! » complètement mécanique. Et le voir ainsi me rend folle. Je me frotte contre lui, l’obligeant à en finir complètement dans mon corps. Il me donne un dernier coup de reins en serrant mes deux seins dans ses paumes et en me mordant le cou passionnément. Nous nous regardons dans le miroir, à bout de souffle. Nous nous voyons sans nous voir. Je le sens se retirer doucement. Son plaisir coule sur ma cuisse. Je remonte ma culotte, boutonne mon pantalon et me retourne vers lui, les seins encore à l’air. — Je ne sais pas ce qui m’a pris, dit-il en essayant tant bien que mal de me fixer dans les yeux. — Ne vous inquiétez pas. Ça restera entre nous. Il me retourne pour faire face au miroir. — Cette œuvre, continue-t-il, l’artiste l’a appelée « l’impudeur ». Et il se peut que de le savoir m’ait encouragé... Je ne recommencerais pas, je te le promets. — Ne faites pas de promesse que je ne veux pas que vous teniez. Refaisons les choses à l'occasion, au nom de l’Art. © Tous droits réservés - Charlie M.P. - 14/11/2021 |